Un peu d’histoire pour expliquer l’architecture...
Le site de Fléchères a eu pendant des millénaires un grand intérêt stratégique. Il contrôlait le gué de Grelonges qui permettait la traversée de la Saône. On rejoignait ensuite les cols du Beaujolais pour se diriger vers l’ouest de la France.
Un camp romain a sans doute précédé le château fort, dont l’existence est attestée dès le XIIe siècle.
Construire un château, une étape pour conforter sa noblesse
En 1606, la seigneurie de Fléchères est achetée à des nobles protestants, partis s’établir à Genève, par Jean Sève, lui-même calviniste.
Après avoir échappé à la Saint Barthélémy lyonnaise en 1572, et connu deux exils à Genève, il joua un rôle important dans la révolte qui permit le retour de Lyon sous l’autorité d’Henri IV (1594).
Trésorier de France, il était un des hommes les plus riches et les plus influents à Lyon au début du XVIIe siècle.
Régent de l’hospice de la Charité, créé pour les indigents, il avait fait construire une aile entière à ses frais.
Devenu échevin puis prévôt des marchands (1612-13), il bénéficiait d’un anoblissement grâce à ces fonctions.
La construction d’un château paraissait une étape obligée pour conforter cette noblesse « de cloche » (allusion aux cloches des beffrois municipaux).
Un bâtiment d’une ampleur inhabituelle
Cependant, l’ampleur du bâtiment, inhabituelle en Lyonnais, et surtout la conservation de l’apparence médiévale (fossés, rempart, tours d’angle, châtelet, pont-levis) devait surtout servir à crédibiliser la légende familiale qui faisait des Sève les descendants directs d’une célèbre famille féodale du Piémont, connue dès le XIIIe siècle, les marquis de Seva.
Un temple calviniste au cœur de la composition
La composition du bâtiment principal, avec un grand corps de logis de trois étages encadré de petites ailes, est surprenante.
Elle s’explique par la présence d’un temple calviniste de 250 m2 au 3e étage du bâtiment central, éclairé par sept fenêtres sur chaque façade.
Après l’édit de Nantes (1595), le nombre des temples était strictement limité mais les nobles pouvaient posséder un « temple de fief » dans une de leurs seigneuries (environ 4 000 en France).
Comme aucun signe extérieur n’était autorisé, les trois lucarnes au sud et au nord ont une ampleur inhabituelle afin de symboliser la Sainte Trinité.
Laissant à Dieu la place d’honneur, les appartements se cantonnent dans les petites ailes et dans les tours.
Pour un historique complet, voir l’article de Sébastien Vasseur, Le château de Fléchères : état des connaissances actuelles sur un fleuron du patrimoine, XVIIe siècle 2005/3, n° 228, p. 547-562.